#poesíasoloenfinde/46

ANNA DE NOAILLES

(París, 1876-1933)

Ignacio Zuloaga - La Condesa de Noailles, 1913
Museo de Bellas Artes de Bilbao

LA PRIMERA PENA

Este verano andábamos por polvaredas altas

en los blancos caminos, de hierba y saponaria.

El poniente rompía encima de nosotros,

veía tu cabello, tus brazos, tus rodillas.

Un inmenso perfume a sueño y a ternura

era como un rosal que florece y que hiere.

Suspiraba a menudo por eso, para que

un poco de mi alma se fuera con mi aliento.

Caía la tarde, tan inclinada y tan triste,

era como el final de todo lo que existe.

Veía que no estabas pensando en nada mío,

¡yo llena de angustia y tú lleno de paz!

Sentía, comprendiendo que mi pena era vana,

que algo se me acababa y se moría en las venas.

Manteniéndome seria, igual que hacen los niños,

te hablaba, con mi herida abierta en el costado…

-Apartaba las ramas de espinos a tu paso

para que no vinieran a rasgarte la cara;

sufría por el frío de tus dedos desnudos,

y cuando, finalmente, la noche había llegado,

y no se veía nada en el camino, oía

tus pies temblando en mí, pisándome la vida.

Así íbamos volviendo al ruidoso jardín,

manaba la humedad, se escuchaba al pasar

- ¡cómo persiste aquel sonido en mi memoria! -

en el aire caliente, chirriar el columpio.

Y entonces regresé, borracha de verano,

cansada ya de todo, muerta porque habías sido

tú la mujer y yo, el hombre, vivo, osado,

y todo el día te había transportado en el alma…

De La sombra de los días (1902), en Las pasiones y las tumbas. Ediciones Torremozas, 2020. Traducción de Mireia Alonso Ribero

LE PREMIER CHAGRIN

Nous marchions en été dans la haute poussière

Des chemins blancs, bordés d’herbes et de saponaire.

Le descendent soleil se dénouait sur nous,

Je voyais tes cheveux, tes bras et genoux.

Un immense parfum de rêve et de tendresse

Était comme un rosier qui fleurit et qui blesse.

Je soupirais souvent à cause de cela

Pour qu’un peu de mon âme en soufflé s'en allât.

Le soir tombait, un soir si penchant et si triste,

C’était comme la fin de tout ce qui existe.

Je voyais bien que rien de moi ne t’occupait,

Chez moi cette détresse et chez toi cette paix!

Je sentais, comprenant que ma peine était vaine,

Quelque chose finir et mourir dans mes veines,

Et comme les enfants gardent leur gravité,

Je te parlais, avec cette plaie au côté…

-J’écartais les rameaux épineux au passage,

Pour qu’ils ne vinssent pas déchirer ton visage;

Nous allions, je souffrais du froid de tes doigts nus,

Et quand finalement le soir était venu,

J’entendais, sans rien voir sur la route suivie,

Tes pas trembler en moi et marcher sur ma vie.

Nous revenions ainsi au jardin bruissant,

L’humidité coulait, j’écoutais en passant

-Ah, comme ce bruit-là persiste en ma mémoire-

Dans l’air mouvant et chaud, grincer la balançoire.

Et je rentrais alors, ivre du temps d’été,

Lasse de tout cela, morte d’avoir été

Moi, le garçon hardi et vif, et toi, la femme,

Et de t’avoir porté tout le jour sur mon âme…

                                          L’ombre des jours(1902)

 

Alicia de Larrocha - La campanella, Franz Liszt